Wednesday 9 November 2011

À la vie, à la mort!

Cette semaine, ma fille de 4 ans, Bianca, aperçoit une brebis morte dehors près de la bergerie. Nous marchions, j'avais Agathe, 1 an 1/2, dans les bras et nous allions donner de l'eau à mes deux vieilles juments dans un pré éloigné.
«Pourquoi il est mort le mouton Maman?»
– «C'est une brebis, ma chouette, et elle était très maigre, malade, et on a pas pu la soigner».
«Pourquoi elle était malade le mouton, Maman?»
– «Elle a maigri sous sa laine sans qu'on s'en aperçoive, elle a nourri ses petits de la fois d'avant trop longtemps, elle s'est fait tasser par les autres pour manger et elle a dépéri. Ça arrive ma chouette et ça fait pas plaisir à Papa pis Maman»
«Min pourquoi la mouton il est là?»
– «Parce que Papa l'a sorti pour aller la porter loin, loin»
«Le mouton il était maigre pis il a eu des bébés pis là il a pas mangé pis là il est mort!»
– «C'est ça, ma chérie».
Ouf!
On s'est rendues jusqu'au champ, donné de l'eau aux juments, flatté leur nez doux comme du velours et on a pris le chemin du retour. Mon chum avait apporté une balle ronde neuve avec le tracteur et avait déroulé la première couche moins bonne et la brebis morte était recouverte.
«Il est où le mouton Maman?»
– «Papa a du s'en occuper ma chouette».
«L'est parti?».
– «C'est ça.»
On rentre dans la bergerie et la première chose que Bianca aperçoit c'est un agneau naissant, mais mort près d'un parc.
«Maman le bébé il est-tu mort?»
–Oui, ma chouette, le bébé est mort-né, ça arrive.»
On passe le triste petit cadavre et on observe des agneaux de quelques semaines qui bondissent partout et profitent du repas de leur mère pour les têter allègrement. Certains tentent même de voler du lait à des brebis qui ne sont pas leur mère. Nous avons quelques brebis vieillissantes, mais encore vaillantes, dont le pis est fatigué. Les bien-portantes seront réformées, c'est à dire quand-même envoyées à l'encan où elles prendront le chemin d'une usine de croquettes à chien après l'abattoir, les pires cas seront réformés à la ferme, c'est-à-dire égorgées sur place et enterrées très creux.
J'attrape un agneau par une patte arrière, au dessus du jarret et lui fait la prise du «Little Beaver» pour l'immobiliser et que les enfants le flattent doucement. Sa laine est fine, serrée, son nez est rose et il sent bon la lanoline derrière les oreilles. J'en profite pour enfouir mon nez dans son cou et prendre une bonne snif. Je libère l'agneau qui bêle un bon coup avant lever le nez, repérer sa mère à l'odeur et se précipiter sur son pis pour se soulager de sa frayeur.
«Il est pas mort, han Maman, le mouton»
– «Non, ma Chérie, il est bien vivant»
«Maman, on va tu le manger le mouton?»
– «Oui, ma chouette, il va se faire manger le mouton, quand il va être grand, quand il sera pus cute pis qu'y va vouloir nous rentrer d'ins jarrets. Là on va être content de le manger, crois-moi!»
«Ben moi y'aime pas ça quand les moutons y rentrent dans les jarrets».
–Ben tu vois, la vie est bien faite, han?»
«Han.»

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